Si l'objectif était de créer la surprise, il a été atteint. Le 1er avril, Barack Obama, le candidat africain-américain à l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle de 2008, avait été le seul prétendant à ne pas annoncer le montant des fonds qu'il avait collectés depuis janvier pour sa campagne. A la date limite fixée par la Commission fédérale des élections, Hillary Clinton avait déclaré avoir reçu 26 millions de dollars de divers donateurs. Un record absolu à ce stade de la compétition. La performance avait été saluée et l'ancienne "First Lady" confirmée comme favorite.
Trois jours plus tard, Barack Obama a étalé ses cartes : 25 millions de dollars. Le chiffre a été jugé "sidérant" par les commentateurs politiques. Le sénateur, âgé de 45 ans, n'a fait ses débuts sur la scène nationale qu'en 2004. Il ne dispose pas de réseaux comparables à ceux de Mme Clinton, qui a déjà mis à contribution son mari, l'ancien président, pour solliciter les donateurs. "C'était un test, a commenté David Axelrod, collaborateur de M. Obama : Maintenant, il est clair que sa candidature est réelle et qu'il a la capacité de durer."
M. Obama a bénéficié du soutien de gros contributeurs dans sa ville de Chicago, à Boston, où il a fait ses études, ou encore à New York. Mais il a surtout reçu le soutien de gens ordinaires. Cent mille personnes ont envoyé des dons, dont la moitié par Internet. Mme Clinton a enregistré moitié moins de donateurs (50 000). Comme Howard Dean, le candidat qui avait électrisé la gauche antiguerre en 2003 avant d'être écarté au profit de John Kerry, Barack Obama est le candidat "viral" : il suscite un intérêt qui fait boule de neige parmi les internautes.
Le résultat arrive à point nommé pour le jeune sénateur. Lassée de l'"obamania", ayant suivi les traces du candidat de Harvard à Hawaï, la presse a commencé à s'interroger sur le contenu de ses propositions. Il a suffi qu'il avoue, lors d'un forum sur le système de santé, il y a quinze jours à Las Vegas, qu'il n'avait pas encore de plan très défini pour que la question surgisse : "Obama est-il tout en style, avec peu de contenu ?" Par contraste, Hillary Clinton fait preuve d'une maîtrise consommée des dossiers. Qu'elle apparaisse devant des infirmières ou des ouvriers du bâtiment, elle leur parle dans le détail de leurs revendications.
Neuf mois avant les primaires, les sommes qui sont en jeu témoignent de l'intérêt que les Américains portent déjà à la campagne. En avril 2003, à dix-huit mois de l'élection présidentielle, 37 % des électeurs disaient s'intéresser à la course. Aujourd'hui, ils sont 65 %, selon un sondage ABC/Washington Post. Les meetings connaissent une affluence sans précédent.
L'intérêt et l'envie d'en finir avec les années Bush sont tels que nombre de primaires vont avoir lieu plus tôt que d'habitude. Traditionnellement, deux Etats donnaient, en janvier, le départ de la course : l'Iowa et le New Hampshire. Pour 2008, le Nevada s'est intercalé. Dans la foulée, la Californie a fixé ses primaires au 5 février, pour ne plus laisser aux petits Etats autant d'influence sur le choix du candidat. Une vingtaine d'Etats envisagent de suivre. Pour les candidats, cette bousculade se traduit par un besoin d'argent encore accru, afin de pouvoir faire campagne dans autant d'Etats à la fois.
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